Преамбула

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RÉSUMÉ

L’intonation archaïque dans les airs folkloriques
(l’aspect de la formation de la hauteur des sons)

Moscou: Sovietski Kompositor, 1986

0.1. Afin de discerner les principes d’organisation de hauteur dans les airs archaïques, il est indispensable de faire abstraction de la plupart des idées préconçues en la matière. La mélodie tonale est à considérer non pas comme normative, mais seulement comme un cas particulier de l’organisation de hauteur dans les airs chantés. Sinon on risque d’interpréter toute manifestation des étapes initiales de la pensée mélodique comme anormale et privée de signification indépendante. En d’autres termes, on a besoin d’une méthode large embrassant tout l’ensemble des divers matériaux folkloriques à partir des formes mélodiques primitives jusqu’aux systèmes développés décrits par la théorie musicale.

0.2. On ne doit pas choisir et classer les matériaux à analyser selon un seul critère d’appréciation esthétique puisque ce critère fort limité ne convient pas à tout l’ensemble des phénomènes analysés. Les catégories du simple et du complexe par rapport à l’organisation de hauteur ne sont pas toujours applicables à la pratique archaïque, ainsi que les concepts du développement progressif ou régressif.

0.3. Pour être exact, c’est l’étude historique concrète qui est nécessaire pour procéder à la recherche du processus de la formation et de l’évolution des systèmes de hauteur des sons, car la formation des structures de hauteur est premièrement et essentiellement un problème de la genèse historique. Mais l’étude historique immédiate, étant extrêmement difficile par rapport à la musique de tradition orale, nécessite d’y employer la méthode d’examen 1ogique.

0.4. Les formes initiales de l’organisation de hauteur sont normalement de nature vocale, la musique instrumentale n’en étant pour beaucoup que dérivée. D’autre part, c’est la pratique de vocalisation solo qui nous paraît primaire, et par rapport à elle la pratique de chant d’ensemble n’est tout d’abord qu’un facteur correctif, bien que puissant. Or, si l’on peut constater une identité des normes logiques initiales concernant la hauteur, c’est parce que ces normes sont en fonction de l’uniformité des conditions acoustiques et physiologiques de l’émission de la voix humaine et de sa perception.

0.5. L’organisation de hauteur dans les airs archaïques est liée de façon syncrétique avec tous les autres aspects mélodiques, notamment avec l’organisation temporelle (métrorythmique et syntaxique), la prononciation de la parole, l’articulation, la gesticulation. C’est surtout dans les formes initiales du chant que la catégorie! de hauteur est indissoluble des caractéristiques de timbre dont la signification sémantique est mise assez souvent au premier plan.

0.6. Ceci dit, la fixation des airs archaïques par notations est assez problématique. A son origine même, la notation de cinq lignes horizontales est liée aux notions de la tonalité développée et ne contribue nullement à comprendre les normes initiales de la pensée mélodique d’une manière adéquate. Néanmoins, elle demeure un instrument analytique irremplaçable dans beaucoup de cas et peut être perfectionnée, en particulier, par l’introduction d’une méthode de fixation des intervalles plus fractionnés que les demi-tons du système tempéré.

La division d’un demi-ton en trois parties égales est exprimée dans cette étude par les signes suivants:

   —élévation à 1/6 d’un ton ("micro-élévation "),

   —abaissement à 1/6 d’un ton ("micro-abaissement").

Pour désigner ces changements de hauteur par les lettres, l’auteur a choisi la syllabe -it (micro-élévation) et la syllabe -et (micro-abaissement).

0.7. L’étude approfondie de la mélodie archaïque suppose une systématisation préliminaire généralisée qui est fondée sur Iles principes de vocalisation obtenus très souvent intuitivement. Cela permet d’esquisser une typologie générale de la mélodie archaïque, tout en considérant le processus du développement mélodique comme un système. Ayant obtenu les principes de vocalisation à leurs propres sphères des possibilités expressives, on les voit entrer immédiatement en action réciproque avec les autres, se développant ensuite de concert. Les résidus de l’action des principes initiaux sont perceptibles même dans les formes développées (de la musique contemporaine qui reviennent assez souvent aux origines de la pensée mélodique.

0.8. Tous les styles de chant existants sont caractérisés par une superposition multiforme des divers moyens expressifs dans Ile processus du développement historique, ce qui permet de trouver pratiquement dans tout air chanté (examiné sous un angle déterminé) une source d’information sur les origines de l’organisation de hauteur. Le folklore d’enfants, l’expression musicale spontanée des adultes et le chant aux défauts manifestes y sont significatifs.

0.9. Un problème supplémentaire dans les recherches de mélodie archaïque est l’élaboration d'une terminologie correcte et la détermination exacte des notions principales. Le procédé auxiliaire serait d’employer à ces fins les analogies croisées, c’est-à-dire les comparaisons tirées des différentes disciplines scientifiques. Outre les notations plus adéquates, on recherche de nouveaux procédés de fixation visuelle du son pour rendre possibles l’algorithmisation de l’analyse et la vérification, à l’aide de l’ordinateur, des hypothèses avancées sur la formation et le développement des Systèmes de hauteur.

1.0. En abordant l’essence de la méthode employée dans cet ouvrage, il est indispensable de souligner que la formation de l’intonation de hauteur est un processus triple caractérisé par:

a) la formation des certains états ("conceptions") de hauteur d’un ton mélodique (I — niveau d’intonation);

b) l’élaboration d’un certain type des relations intertonales, i.e. des fonctions des tons (F — niveau de fonctions);

c) la formation et la stabilisation des échelles des tons (S — niveau d’échelles).

Logiquement, les formes stables de la mélodie tonale ont dû succéder aux étapes de l’absence relative de hauteur réglée : l’absence d’échelles fixes ou leur variabilité particulière, l’indétermination des relations intertonales, l’état préalable des tons mélodiques. Il faut souligner que c’est notamment l’état (la conception) du ton qui détermine les relations intertonales ainsi que le règlement d’échelles ou l’absence d’un tel règlement.

L’étude des matériaux mélodiques les plus divers et, avant tout, des vestiges archaïques dans les airs folkloriques permet de différencier, au minimum, trois principes généraux de hauteur aux étapes initiales du processus de formation mélodique. Ces principes sont désignés par trois premières lettres de l’alphabète grec.

1.1. Le principe α n’est pas lié à la hauteur perçue distinctement; il suppose l’utilisation des registres de voix différents de timbres, mais point de hauteur comme telle, bien qu’elle y soit différente. Dans ce chant aux registres-timbres (registres contrastants de timbres), la hauteur, absorbée et presque dissoute par le timbre, n’est pas encore devenue un élément sémantique du discours musical. Cette espèce de chant pourrait être nommée "chant de timbres". Une notation de la mélodie du type α peut partiellement désorienter la perception puisque toute notation fixe les relations de hauteur exacte et pas les relations qui se situent essentiellement hors de hauteur. Le principe de vocalisation a est exprimé manifestement dans les thrènes extatiques de large diapason (Exemples 1, 2 et 6).

1.2. La hauteur de l’intonation β est perçue distinctement, mais elle y varie en glissant de façon permanente. Les tons glissants qui en résultent sont le plus souvent dans le mouvement descendant. Leurs notations sont très conventionnelles et les rendent quasi discontinus d’apparence. Le plus souvent, le glissement de hauteur dans la vocalisation β est déterminé par la limite du souffle du chanteur et pourrait être indiqué comme "chant respiratoire". On voit le plus souvent cette espèce de chant dans les genres folkloriques où l’articulation de la parole est très importante, ainsi que dans de divers appels de voix (Exemples 91 et 18).

1.3. Le principe γ représente plus que les autres la conception de hauteur déterminée, ainsi qu’il suppose d’opérer par un certain nombre de degrés mélodiques au cadre d’un seul registre de voix. Il faut constater qu’à l’opposé du chant tonal, les proportions entre les tons y peuvent varier considérablement à la répétition, mais leurs modifications sont si petites que les variantes d’un même ton qui en résultent laissent s’intégrer en un seul degré variable. Tel chant de degrés variables privé d’échelles fixes précède immédiatement le chant tonal. Il a lieu dans les plus divers genres folkloriques.

1.4. Tout principe initial peut agir indépendamment de deux autres et tous les trois forment des classes séparées de vocalisation. Certes, il serait imprudent d’exclure entièrement l’existence des autres principes d’intonation, supposons un certain principe δ etc. Même s’il n’y en a en effet que trois, les possibilités de classer la mélodie archaïque sont très larges, puisque ces principes peuvent intervenir de concert dans le même air — en alternant ou employés ensemble. Donc, les combinaisons de deux ou de tous les trois principes forment encore quatre classes de la mélodie archaïque: αβ (Exemple 26), γβ (Exemple 21), γα (Exemple 5 et 93) et γβα (Exemples 39, 28, 25).

En tout cas, la présence des registres contrastants dans le même air peut être considérée comme la manifestation du principe mélodique α; le mouvement descendant et les sons glissants comme des résultats de l’action du principe β; et l’existence des degrés variables de hauteur comme une manifestation de l’intonation γ. La corrélation de ces classes fait voir l’action réciproque du continu et du discontinu dans la mélodie archaïque:

Figure 1

Figure 1


1.5. La classification proposée permet d’introduire l’appréciation quantitative et une hiérarchie des types mélodiques concrets selon leurs possibilités expressives. Naturellement, c’est le principe β, à des tons toujours glissants, extrêmement continus, qui a les possibilités expressives les plus limitées ; au contraire, c’est le chant γ, extrêmement discontinu, aux échelles mobiles, qui en a les plus larges. Par conséquence, c’est l’intonation α continue et à la fois j discontinue qui en est intermédiaire, le principe α supposant la continuité au niveau des tons et la discontinuité au niveau des registres.

Si on prend le coefficient des ressources expressives de l’intonation p pour un et on suppose qu’avec la transition à la mélodie α et, ensuite, à la mélodie γ elles sont doublées chaque fois : — I donc, on peut établir sept classes du chant archaïque à l’aide du I petit carré de Weitsch. Les possibilités des classes mixtes sont appréciées à l’aide du total des coefficients des principes en action):

Table 1

Tabelle 1


1.6. L’intonation archaïque n’est pas absolument séparée des formes plus développées du chant mélodique. A l’inverse, c’est l’évolution historique de l’intonation archaïque qui aboutit à la formation des tons stables comme à celle des complexes tonals à des relations intertonales stables, voire à la formation du chant de hauteur stable ou de l'intonation tonale (t). Le principe d’intonation t commence à dominer au fur et à mesure de I la conquête de la hauteur stable. Avec cela, les proportions intertonales mobiles deviennent elles aussi tout-à-fait stables. C’est l'ordre intrinsèque du système de hauteur qui en résulte. Même si la stabilisation des tons n’est encore que relative (car leur hauteur ne cesse pas de varier au-dedans des zones assez larges), ce ne sont pas des tons disjoints, mais la totalité des proportions intertonales stables qui deviennent sujettes aux déplacements de hauteur, i. e. l'ordre intrinsèque d’un air.

1.7. Le processus de la formation des complexes mélodiques t est accompagné du changement de qualité des structures de hauteur Leurs possibilités expressives augmentent considérablement à mesure que la hauteur discontinue l’emporte définitivement sur les manifestations de la hauteur continue. D’ailleurs, les relations tonales en voie de consolidation n’excluent pas entièrement l’action des principes d’intonation archaïques. Cependant, ces derniers reculent à l’arrière-plan de la pensée mélodique comme à la subconscience et mettent en relief l’action du principe t qui est plus fort dans la hiérarchie d’après ses possibilités expressives.

La transition aux systèmes tonals suppose une stabilisation d’échelles qui entrave la manifestation libre des principes de l’intonation archaïques en limitant considérablement leur action. Les principes d’intonation initiaux s’intensifient parfois même aux étapes fort avancées du développement du chant mélodique, mais, en règle générale, on a besoin d’y effectuer une analyse spéciale pour retrouver leurs vestiges. A cet effet on s’en tient aux considérations suivantes. L’opposition des syntagmes mélodiques différents de hauteur dans un air tonal est à considérer comme un fait porteur de la sémantique α. Le mouvement mélodique descendant par un large diapason, de même que les passages glissants sont les manifestations de l’intonation β. Et les degrés variables dans une échelle résultent évidemment du principe γ.

1.8. Puisque la transition à l’intonation t n’arrête pas l’action des principes α, β et γ entièrement, c’est à l’aide du grand carré de Weitsch destiné au règlement de quatre composants qu’est possible la hiérarchie générale de tous les types d’organisation de hauteur dans les airs:

Table 2

Tabelle 2


Les possibilités expressives du principe t (8) sont supérieures à celles des principes précédents dans le total (1 + 2 + 4 = 7). Il en résulte une série de quinze positions qui embrasse tous les types du chant mélodique par rapport aux principes d’intonation et qui correspond assez bien, en même temps, à la pratique réelle. Effectivement, plus haut est le principe d’organisation mélodique et plus grand est le nombre des principes en action, plus riche et variée est l’expression de l’air.

2.0. La différenciation de fonctions des tons mélodiques est un problème beaucoup plus difficile à résoudre. La solution proposée ici n’est encore que préalable, car les fonctions des tons se rapportent non seulement au règlement de la hauteur, mais encore à l’organisation métrorythmique et syntaxique.

C’est l’opposition de deux principes d’organisation des fonctions des airs qui est suggérée en tant qu’un point de départ:

1) le principe de coordination des tons mélodiques — k;

2) le principe de subordination des tons mélodiques — s.

Le premier principe suppose l’équivalence de tous les degrés mélodiques qui composent un air, le second suppose leur subjugation hiérarchique. Dans le folklore archaïque on observe avant tout l’action de ces principes dans la mélodie γ et aussi, bien que partiellement, dans les complexes mélodiques α. A la transition aux systèmes tonals, la différenciation des fonctions devient plus déterminée et laisse distinguer deux voies principales dans le développement de la mélodie t: "coordinatonalité" et "subordinatonalité".

2.1. Les structures coordinatonales sont caractérisées par l’absence d’un élément central subordonnant tous les autres éléments du système. Il serait absurde d’y chercher un centre ou une tonique. Ce n’est pas la différence qualitative des degrés de hauteur dans un air, mais seulement leur quantité qui y est significative. Telles fonctions coordinatonales (k) pourraient être appelées "nominatives", puisque le rôle d’un certain ton n’y est déterminé que par sa position par rapport aux autres tons qui sont tous pratiquement équivalents dans la structure de hauteur d’un air. Les fonctions de ces tons ne peuvent pas être rangées selon leur signification dans le système. Pourtant, on peut les désigner par le numéro ordinal des tons correspondants, par exemple, le plus grave sera le 1er etc. jusqu’au plus aigu.

2.2. Puisque l’organisation mélodique k suppose qu’aucun des tons n’est dominant ni dominé, leur distribution dans un air doit être plus ou moins égale. Cela concerne la durée totale des prises de chaque ton et la quantité des syllabes chantées pendant toutes ces prises, ainsi que certaines particularités métrorythmiques et syntaxiques (coïncidences des tons avec les accents et les demi-accents et avec les moments initiaux et finals des syntagmes mélodiques). La coordination des tons exige un certain équilibre. A cet effet on doit aussi tenir compte du caractère frappant des tons les plus aigus, les plus graves et finals.

Ainsi, plus le nombre des tons dans un air est limité, plus l’équilibre de fonctions est facile à atteindre (Exemple 60). Mais souvent on trouve cet équilibre dans les airs assez longs et développés (Exemple 52).

2.3. La réalisation du principe de fonctions k suppose aussi la présence de certaines échelles qui favorisent l’indépendance des tons mélodiques. On atteint leur équilibre assez facilement à condition de la présence des distances intertonales assez égales et larges. L’action du principe coordinatonal dans les airs archaïques de hauteur instable aboutit à l’uniformité des échelles en voie de formation, parmi lesquelles on relève les complexes divisés par tons ou par plus larges distances (Exemples 57 et 68) ainsi que des séries ascendantes qui se raccourcissent à leurs répétitions peu à peu. Ces dernières, qui sont liées à la gamme des sons harmoniques, peuvent être nommés "proportionnelles", puisque le raccourcissement des distances intertonales y est inversement proportionnel aux fréquences des tons et à la tension de voix. (Les distances intertonales se raccourcissent aussi vers la limite grave de l’étendue de voix d’un chanteur.)

Le développement des structures de fonctions k (coordinatonales) est contrôlé strictement par oreille et vise à former des systèmes anthémitoniques dont le représentant typique est le système pentatonique.

2.4. Le principe de formation structurelle des systèmes subordinatonals ou hiérarchiques (s) suppose la soumission des tons mélodiques à un ou quelques centres bien marqués. Cette soumission peut s’effectuer directement ou par l’intermédiaire des autres tons. On peut reconnaître intuitivement la mélodie de cette espèce par les tendances de certains tons vers les autres. Ces tendances se trouvent statistiquement significatives dans la structure temporelle et celle de hauteur d’un air (Exemples 24 et 84). Elles suscitent aussi le rapprochement des tons tendus, enclins l’un vers l’autre (l’apparition d’une "note sensible") ou la concordance acoustique des tons d’une échelle par quartes et quintes. Tout cela transforme les échelles à des distances égales, oppose les intervalles larges et étroits et aboutit à une différenciation précise des tons et des demi-tons dans les échelles hémitoniques. Les systèmes de fonctions s (subordinatonals) les plus typiques sont les systèmes diatoniques.

2.5. A cet effet, certaines idées théoriques en usage sur la corrélation des systèmes pentatoniques et diatoniques doivent être revues. Il ne faut pas considérer ces systèmes en tant qu’étapes progressives d’une évolution (donc, l’échelle pentatonique comme incomplète ou arriérée), puisqu’ils se développent parallèlement à partir des racines archaïques communes ayant les principes structurels et fonctionnels tout-à-fait différents. La différence de principes aboutit forcément à celle des ressources expressives, ainsi qu’à la différence de directions dans l’évolution historique. En particulier, le système diatonique s’avère capable au développement intense, tandis que le système pentatonique tend à une limitation d’échelles et à leur conservation relative.

Bien entendu, ce point de vue n’a rien à voir avec l’appréciation esthétique. La base diatonique peut aussi servir de terrain aux phénomènes sans débouché qui sont pareils à certaines impasses pentatoniques. D’autre part, il y a des dérivations du système pentatonique qui contactent les autres systèmes et possèdent un potentiel immense.

Ayant les mêmes origines, les principes d’intonation pentatonique et diatonique sont en action réciproque qui a donné naissance aux multiples hybrides viables. Certaines cultures pentatoniques sont influencées et transformées par la pratique diatonique, de même que certaines cultures exclusivement diatoniques conservent des vestiges ou des influences pentatoniques. Ces liens convergents sont assez souvent limitrophes par rapport aux zones de chant diatoniques et pentatoniques, par exemple, dans le folklore de diverses populations ethniques dans les régions de la Volga et de l’Oural. En particulier, les chants lents des bachkirs et la pratique vocale et instrumentale bien singulière des kalmouks peuvent être considérés comme cultures hybrides.

Cependant, en règle générale, les systèmes pentatonique et diatonique sont d’origine divergents. Leur différence se rapporte essentiellement non seulement aux échelles différentes (de cinq ou sept degrés), mais plutôt aux principes opposés de l’organisation de fonctions de hauteur. C’est une opposition générique de deux systèmes mélodiques: celui de subordination des degrés mélodiques à un seul centre, ou celui de coordination des niveaux d’intonation avec les fonctions plus ou moins égales.

2.6. Donc, l’opposition des principes de fonctions n’exclue point leur action réciproque. Le folklore archaïque possède déjà, au-delà des structures inclinées à l’organisation coordinatonale ou subordinatonale, des formes intermédiaires (des zones interférentes) qui réunissent ces deux principes. Le plus souvent cette action réciproque aboutit à la subordination des tons tendus (attractés) à deux ou plusieurs tons d’appui (attractifs) coordonnés. Puisque dans la culture de chant solo ces tons ne peuvent pas résonner simultanément, ils ne font que s’alterner dans le même air. C’est pourquoi les relations "subordinato-coordinatonales" sont très souvent traitées comme la variabilité de fonctions. Tels complexes polycentriques forment un type particulier d’organisation de fonctions (sk).

2.7. Il est bien probable que les types de l’organisation de fonctions dans les airs chantés dépendent non seulement de l’action des facteurs opposés: centralisateurs (subordinatonals) et décentralisateurs (coordinatonals). Les relations des tons mélodiques peuvent être déterminées encore par d’autres facteurs, en particulier, par le développement musical énergétique (dynamique). On peut citer par exemple la "triade" de Boris Assafiev qui avait interprété la suite logique "initium — médium — terminus" (i : m : t) comme "impulsion — mouvement — terminaison". On peut d’ailleurs supposer que les rôles des tons différents de hauteur peuvent coopérer à la base jusqu’ici méconnue. En particulier, dans les cultures aux langues tonales (dans la culture vietnamienne par exemple) l’intonation proprement musicale du chant doit correspondre aux relations de hauteur dans l’intonation parlée. Les fonctions des tons mélodiques y sont nécessairement en corrélation avec la sémantique de hauteur dans le langage. D’ailleurs, il n’est pas exclu que l’intonation parlée influence à un certain point le système de fonctions de hauteur dans toute culture musicale.

Ainsi, le règlement de fonctions dans les cultures pareilles doit être l’objet des études spéciales sur l’interaction de la musique et de la parole.

A cet effet, on introduira dans la typologie de fonctions des airs archaïques au moins encore un principe hypothétique désigné par l’indice x. Or, le schéma de la typologie générale (figure 2) peut être modelé selon la classification des trois principes d’intonation:

Diagrama 2

Figure 2


3.0. L’étude des échelles est la partie la plus développée dans la théorie de l’organisation de hauteur, mais cela ne concerne généralement que les échelles du type tonal. La systématisation des échelles en voie de formation reste toujours un problème assez compliqué.

3.1. En abordant le problème des échelles en général, on doit avant tout fixer trois possibilités de principe: l’absence d’échelles, i. e. le chant hors d’échelles (le cas nul — 0), le procédé par les échelles mobiles (mbl) et la présence des échelles stables (stb). Le premier et le second cas se rapportent à la pratique archaïque, le troisième marque l’apparition des systèmes tonals.

Puisque ces trois possibilités peuvent être réunies dans le même air folklorique, la systématisation générale des types d’organisation de hauteur et de fonctions dans la mélodie archaïque doit comprendre sept diverses combinaisons (le niveau S de la tabelle 3).

3.2. La transition d’un type d’échelles à un autre n’est pas déterminée par certaines limites rigides. L’appréciation des divers types d’échelles dépend dans une grande mesure des traditions de perception. Le phénomène considéré comme tout-à-fait stable dans une culture, peut paraître extrêmement variable dans une autre. Par exemple, il y a une différence fort marquée entre les cultures fondées sur le chant solo et celles employant les instruments évolués.

En tout cas, le critère principal est la zone au-dedans de laquelle les sons différents de hauteur s’intègrent au même ton mélodique. La transition des échelles mobiles aux échelles stables dépend de l’étendue de cette zone qui varie d’une culture à une autre. Aussi, la moyenne de la zone doit-elle être établie dans chaque culture concrète à l’aide des recherches spéciales dont les résultats permettront sans doute de distinguer les nuances de hauteur sémantiques parmi les déviations de hauteur occasionnelles (les fluctuations d’un ton mélodique).

3.3. La limite qualitative qui se trouve entre les échelles stables et les structures de hauteur variable dépend aussi de l'ordre intrinsèque du système de hauteur. Cet ordre intrinsèque existe dans la pensée du chanteur avant la reproduction d’un air, indépendamment de la hauteur acoustique. Bien entendu, la notion de l’ordre intrinsèque du système de hauteur ne peut être rapportée correctement qu’au chant tonal. Il est donc nécessaire de souligner que le chant tonal est le seul qui permet l’utilisation partielle des échelles. Au contraire, les structures de hauteur archaïques α, β et γ sont toujours variables, individuelles et même intègres dans leur déroulement, car elles ne peuvent pas exister dans un système de hauteur hors d’un spécimen mélodique concret. C’est pourquoi la notion de l’ordre intrinsèque du système de hauteur ne se rapporte aux échelles archaïques qu’à la condition d’une généralisation théorique des structures individuelles et mobiles.

Autrement dit, la mélodie archaïque, absolument systématique aux niveaux d’intonation et de fonctions, ne forme aucun système achevé au niveau d’échelles.

3.4. Néanmoins, c’est le niveau d’échelles qui permet d’analyser la mélodie d’une façon plus objective et de mesurer des résultats pour les apprécier qualitativement. Donc, on peut plus ou moins facilement formaliser l’analyse des échelles en y introduisant des critères numériques afin d’élaborer des algorithmes pour l’ordinateur. A cet effet il est indispensable de préciser la définition des notions telles que l’air, le ton, la zone et la fluctuation de hauteur.

Les définitions acceptées dans cet ouvrage sont les suivantes. L'air est un stéréotype répété qui est à la base de l’organisation périodique d’une ligne mélodique. Le ton mélodique est une totalité des sons rapprochés par la hauteur et identiques de fonction dans l’air. La zone est un diapason de fréquences, dans lequel les sons chantés s’intègrent dans la perception en formant le même ton mélodique avec la même signification. Les fluctuations sont des déviations occasionnelles de la hauteur du ton par rapport à la norme statistique moyenne qui ne sont pas qualitativement significatifs dans la structure de hauteur. Par conséquent, l’absence d’échelles (0) est caractérisée par la distribution aléatoire des tons dans l’air et par leurs fluctuations extrazonales. La mobilité d’échelles (mbl) est considérée selon les changements graduels de hauteur, i. e. les fluctuations intrazonales ainsi qu’extrazonales d’une, de quelques ou de tous les tons d’un air à la répétition. Enfin, la stabilité d’échelles (stb) est caractérisée par les fluctuations exclusivement intrazonales des tons mélodiques dans toutes les reprises d’un air, malgré les déviations possibles de l’ordre intrinsèque du système de hauteur de l’air entier.

3.5. Le processus historique de la formation d’échelles dépend dans une grande mesure du règlement des types d’intonation et de fonctions dans la mélodie. C’est pourquoi l’analyse d’échelles approfondie contribue aussi à élaborer les critères supplémentaires afin de différencier l’intonation et les fonctions. L’analyse de la mélodie archaïque permet de démontrer les liens entre l’organisation de fonctions dans un air et la structure d’échelles (cf. 2.3. et 2.4). Il est à souligner que le critère principal de la différenciation de fonctions des tons est la distribution des tons de différents degrés de hauteur: l’équilibre statistique de tous les tons par rapport aux fonctions k et l’absence de tel équilibre par rapport aux fonctions s.

Afin de différencier les types d’intonation archaïque α, β ou γ, il serait raisonnable de corréler le diapason général, le nombre des registres-timbres en présence et l’étendue des zones de tons. Donc, ce sont les fluctuations extrazonales qui entravent l’identification de hauteur des tons, ainsi que les coïncidences des ruptures dans la structure de hauteur et dans celle de registres de voix qui sont à considérer comme les critères d’intonation α. L’indice des complexes β est la modification extrazonale glissante de la hauteur du même ton (dans la même syllabe). La différenciation de plusieurs tons du même registre de voix, ainsi que la transformation extrazonale graduelle des tons à la répétition de l’air sont les critères de la mélodie γ.

Le critère d’échelles des tons t est, naturellement, le même que celui d’échelles stables.

4.0. En guise de conclusion, il est indispensable de déterminer plus précisément l’action réciproque de trois niveaux de l’organisation de hauteur mélodique. Certes, il s’agit de la corrélation des éléments constitutifs selon leur position d’échelles, leur fonction et leur signification dans le contexte sémantique de l’intonation.

Chacun de ces niveaux possède sa propre organisation systématique et structurelle. Tous ensemble ils forment un certain système où les niveaux hiérarchiques deviennent de plus en plus compliqués, portant en eux-mêmes les principes transformés des niveaux précédents. C’est le niveau d’échelles qui se prête le plus à la fixation objective à l’aide de l’analyse quantitative de tous les paramètres de la structure d’intervalles dans les airs. Le niveau de fonctions comprend les corrélations des intervalles traités comme des phénomènes acoustiques ainsi que psycho-physiologiques (par rapport à la distribution d’intervalles statistique et à leur signification). Enfin, le niveau sémantique d’intonation exige une analyse approfondie de la mélodie dans le contexte socioculturel en général.

4.1. La corrélation combinatoire des formules reçues à l’aide des carrés de Weitsch est présentée dans une table sommaire (tabelle 3) qui embrasse le chant archaïque ainsi que la pratique mélodique développée. Cette table est divisée en deux parties. Les principes d’intonation y sont présentés en grande série de 15 positions. De même, l’axe de fonctions donne une série de 7 positions (3 principes + 4 combinaisons des principes).


Table 3

Tabelle 3


Il est à souligner que le contenu des principes d’intonation α, β et γ dans la droit partie de la table est, à un certain degré, différent de leur contenu dans la gauche partie où ces principes ne sont pas encore soumis au principe tonal dominant. L’intonation t formée, la signification des structures α, β et γ devient secondaire. Ainsi, la dernière combinaison sommaire des principes d’intonation et de fonctions tγαβskx symbolise la mélodie tonale développée: elle embrasse les tons-degrés Variables, l’opposition des registres-timbres, les tons glissants, et, en même temps, elle réunit les fonctions coordinatonales, subordinatonales et verbales. Il est évident que ce type mélodique fondé sur la stabilité d’échelles n’exclue pas la présence des échelles mobiles ou même l’absence des échelles (la formule stb-mbl-0).

La table donnée renferme approximativement tout le champ de la communication sonore y compris les possibilités d’intonation et de fonctions. Toute culture mélodique, donc, peut être classée et, ensuite, mise dans cette table. Sa position dans la table peut changer selon l’évolution historique.

4.2. La présente méthode est capable d’embrasser aussi les autres aspects du discours musical. Par exemple, on peut essayer de construire des tables analogues pour la classification des principes métrorythmiques de l’intonation. L’organisation temporelle d’un air, quelle que spécifique qu’elle soit, possède aussi les principes de départ et leurs combinaisons. Le flux sonore, premièrement informe et indivise par la pensée du chanteur, devient peu à peu séparé en deux ou plusieurs qualités: ce sont les durées sonores indéterminées (relativement longues ou courtes ou même presque égales, mais divisées par les pauses). On peut y trouver les principes initiaux de l’organisation temporelle dans les airs, analogiques aux principes d’intonation γ et β. Cependant, une classification pareille des -airs archaïques exige des recherches spéciales en dehors de cet ouvrage qui est limité par les problèmes de hauteur.

La présente méthode de classification peut embrasser aussi les relations bien compliquées des vers et des’ -airs dans les chants. En particulier, un procédé combinatoire pareil a été employé à la systématisation de la mélodie des chants épiques des yakoutes (v. la bibliographie de l’auteur).

4.3. En ce qui concerne l’organisation de hauteur dans les airs archaïques, il faut encore une fois essayer de répondre à la question principale: les présents types d’intonation forment-ils un système de classification bien proportionné ou seulement un assemblage inachevé des observations disparates et des constatations partielles sur les matériaux mélodiques hétérogènes? Si oui, cette classification n’est-elle que spéculative, peut-elle renfermer toute la variété possible des procédés d’intonation, est-elle capable de contenir les principes effectifs et efficaces par rapport à la hauteur initiale continue?

On répondra définitivement à ces questions en réalisant pratiquement les méthodes proposées à l’aide des modèles analogues à ceux utilisés déjà dans les recherches par l’ordinateur. Il ne nous reste maintenant que proposer un schéma final du processus hypothétique de formation de la pensée de hauteur et, dans une certaines mesure, de l’évolution du chant mélodique:

Figure 3

Figure 3


On distingue l’étape initiale (embryonnaire) dans l’évolution des structures de hauteur et les formes développées de la mélodie tonale pour représenter clairement l’évolution historique du chant mélodique, à partir des formes indéterminées et mobiles jusqu’aux systèmes de hauteur stables pentatoniques et diatoniques. Ces derniers proviennent du principe d’intonation γ qui différencie les fonctions coordinatonales et subordinatonales.

Ainsi, les types d’intonation archaïques sont décrits dans cet ouvrage conformément à la différence des états du ton mélodique. Au-delà des paramètres acoustiques, il est indispensable de tenir compte de la détermination de la hauteur et de sa signification sémantique dans la pensée du chanteur. Il est à noter, finalement, que l’orientation vers les types de l’intonation archaïque facilite la lecture diverse des mêmes notations, puisque ces notations résultent des différents modèles graphiques de la mélodie archaïque.

Version française: Youri Semenov




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